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Kader Kabore, né en 1988 au Burkina Faso, vit et travaille à Ouagadougou, où il a fondé l'atelier et le centre d'art communautaire Ka-Yiiri. La résidence de Kabore est soutenue par Africalia.

Avec la série des nattes, une voie s’ouvre à l’artiste. Elever un objet du quotidien à un niveau esthétique et symbolique offre la possibilité de transcender le vécu. La natte est le lieu de la rencontre quotidienne des corps, l’endroit de l’arrivée comme celui du départ. Plus prosaïquement, on la piétine, on y mange, on y dort. La vie s’y déroule, à ras du sol.

Servant de couche commune, la natte devient le lieu du désir amoureux, de la fusion charnelle et de la jouissance. A l’inverse, elle accueille le malade souffrant et recueille le dernier soupir de celui qui agonise. Placée sur la face du corps du défunt elle le protège dans l’au-delà invisible.

Kader expérimente différentes solutions plastiques. Après la peinture acrylique, il intègre les clous : en scarifiant et en boursouflant, ces clous parlent d’un processus de métamorphose du corps. La broderie de fils de couleurs crée le motif et les aplats colorés. Les possibilités de combinaison de couleurs et de narration sont infinies. Il opère aussi en défaisant la natte : les fils libérés peuvent alors être re-tressés. Fixé à une attache murale l’écheveau de tresses est soumis à la pesanteur. Les fibres ploient telles une chevelure.

La natte est le lieu de l’impossible effacement des corps. En poursuivant sa quête sur l’ombre des êtres Kader entretient sa propre part de mystère. Son oeuvre confronte le spectateur à ses doutes existentiels tout en le réjouissant du contact avec une toile libre et flottante.