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Institutt for Degenerert Kunst: Chrysagire (The Gold of Expiation)

03 12 2009 00:00 01:00

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L'artiste en résidence Anders Nordby invite le collectif d'artistes norvégiens dont il est membre à exposer dans la Project Room de Wiels. Institutt for Degenerert Kunst se définit comme la perte d'un type particulier de conscience, qui correspond à l'effondrement simultané d'associations distinctes. L'élément le plus important du concept est que l'activité de la conscience doit toujours être considérée comme le produit de nombreux processus psycho-physiques simultanés.

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Institutt for Degenerert Kunst Chrysagire The Gold of Expiation

Chrysagire (The Gold of Expiation)

La "Grandeur que fut Rome" avait à ce point travaillé le concept de Cloaca Maxima et était à ce point sensible à la souillure de celui qui trempait ses mains dans le commerce qu'elle avait créé, sous Vespasien, un impôt sur les urines qui fut, semble-t-il, étendu plus tard par Constantin aux excréments des hommes et des animaux sous le nom, ô combien délicat, de "chrysagire". Il arrivait aussi qu'on le nommât "or lustral" ou d'expiation. Car cet impôt avait la propriété d'être prélevé sur les commerçants et sur les gens de mauvaise vie, tenus les uns et les autres dans une semblable infamie, confondus même dans l'opprobre dont ils constituaient le signifiant. Mendiants, filles publiques, commerçants, trafiquants, débitants s'égalaient ici au "chien" - avec l'âne et les bêtes de somme lui aussi taxés sur ses excréments - soit cet "animal olfactif" dont, nous dit Freud, l'intérêt qu'il accorde aux excréments lui fait encourir le "mépris de l'humanité".

On peut s'étonner que de cette pratique n'ait été retenu que le diction célèbre "l'argent n'a pas d'odeur" quand elle dit de façon aussi patente une vérité qu'aucune économie politique n'a jamais cessé de dénier, dans un silence si obstinément tenace qu'il ne se peut mesurer qu'à l'aune de la dette qui là-dessus pesait. La Loi romaine parle comme un évangile: on est toujours puni par où on a péché. Tu t'es livré au commerce, toi, pute ou trafiquant, tes mains sont pleines de l'ordure, à cela, chien que tu es, on te flaire, toi dont l'odeur détourne le passant, eh bien tu paieras là où tu auras fauté: sur ta merde même on t'imposera. Seule cette offrande d'or que tu remettras aux collecteurs pourra te faire expier ton crime. Et dans le moment même où tu viendras te laver de tes péchés ton or même qui auparavant puait sera transformé au lieu du vierge pouvoir qui évanouira son odeur et de sa bouche articulera "non olet". Admirable concrétion de sens et des sens que celle qui s'exerce ici à multiplier subtilement le jeu des équivalences, des synonymies et des antonymies, des sympathies de l'or et de la merde dont la logique sera rarement articulée de façon aussi limpide sur la scène de l'histoire.

Extrait de Dominique Laporte, Histoire de la merde, 1978

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